Nous vous proposons actuellement un concours pour gagner « Le Monde Merveilleux du Gras », le dernier ouvrage du Dr Laurence Plumey.  Ici le médecin nutritionniste a souhaité partager ses connaissances en regard de l’épidémie de Covid-19 qui nous frappe et nous donne quelques conseils pour bien manger en confinement. 

Pourquoi ce virus est il si agressif ?

« On pourrait effectivement se poser la question sachant que ce virus appartient à la famille des coronavirus, famille que nous connaissons bien car ses cousins nous envahissent régulièrement pour donner …un rhume. Toutefois, souvenons-nous de l’épidémie de SARS (Syndrome Respiratoire Aigu Sévère) lié au Coronavirus de type 1, en 2002-2003. Bref, ces microbes qui ne font pas plus de 100 nm (soit 10 000 fois plus petits qu’1 mm) sont donc des habitués de la sphère respiratoire, et s’y entendent pour y causer des dégâts. En effet, ce nouveau virus est équipé de récepteurs qui lui permettent de rentrer à l’intérieur de nos cellules pulmonaires et de modifier l’équilibre qui règne au fond de nos poumons. Pour bien comprendre, il faut savoir que, habituellement, nos cellules respiratoires (mais aussi cardiaques) expriment deux récepteurs à la surface de leur membrane extérieure, dont les effets sont diamétralement opposés. L’activation du récepteur de type ACE  développe inflammation, œdème, fibrose rétrécissement du diamètre des vaisseaux et donc augmentation de la pression sanguine – alors que l’activation du récepteur ACE2 fait exactement le contraire. En temps normal, ils se neutralisent et il y a un juste équilibre entre eux. Quand le virus arrive, il se fixe sur les récepteurs ACE2 (c’est sa porte d’entrée) et pénètre dans la cellule en les entraînant avec lui (comme un sous marin plonge dans les profondeurs). Il provoque donc un raréfaction de ces récepteurs ACE2 à la surface des cellules respiratoires. Les autres récepteurs de type ACE deviennent donc dominants et déclenchent (dans les formes graves) tous les problèmes d’orage inflammatoire, d’insuffisance respiratoire par œdème pulmonaire, et de décompensation cardiaque – que nous constatons chez les sujets en réanimation ».

Pourquoi les degrés de gravité sont ils si différents selon les personnes ?

« Le contexte de santé et d’âge compte beaucoup car les capacités de résistance ne sont pas les mêmes d’une personne à l’autre. Mais sachons tout de même que dans 85% des cas, la forme reste bénigne. Le sujet a un peu de fièvre et de la toux. Il se sent extrêmement fatigué et présente de façon quasi systématique (au point que c’en est presque un signe diagnostique, entre autres) une étonnante anosmie (il ne sent plus rien) et agueusie (le goût disparaît). Il est très contagieux via ses gouttelettes de salive et ce avant, pendant et au moins durant les 15 à 20 jours suivant le jour de la contamination ; d’ailleurs en général toute la famille proche est contaminée. Malheureusement, dans 15% des cas, la situation dégénère, surtout à partir du 7ème jour. L’orage inflammatoire se répand et le sujet ressent une profonde détresse respiratoire, nécessitant une prise en charge en service de réanimation, pendant au moins 15 jours. 

Grâce à la formidable réactivité des médecins généralistes et à l’extrême efficacité  du personnel hospitalier de réanimation, le plus souvent ces patients guérissent de cette terrible épreuve. Il leur faudra se remettre d’une profonde fatigue et d’une perte de poids souvent importante. Mais parfois, malheureusement l’issue est fatale et nous avons d’ailleurs défini des critères de facteurs de risque tels que le diabète, l’obésité, l’hypertension artérielle (même traitée), un terrain cardiaque, l’existence d’une broncho pneumopathie chronique obstructive (BPCO) souvent liée à un tabagisme intensif, un état de dépression immunitaire (chimiothérapie), ainsi que l’âge (plus on est vieux, plus on est fragile !) et même le sexe (beaucoup plus d’hommes sont touchés que les femmes) ».

Mais on s’en remet souvent, n’est ce pas ?

« Oui, heureusement. Mais tout dépend de quoi on parle. A l’échelle de la population et des cas déclarés, on estime que le taux de mortalité est proche de 1 à 2%. Mais si on intégrait tous ceux qui ne se sont pas déclarés et qui ont été infectés, on pourrait plutôt estimer un taux de mortalité proche de 0,4%. Cela paraît peu, mais si nous raisonnons à l’échelle d’une population de 50 millions d’habitants en France (en excluant les très jeunes enfants), cela ferait tout de même le décès de 200.000 personnes ! C’est ce qui se passerait si nous ne faisions rien et laissions la Nature faire son travail. Inacceptable et intolérable, bien sûr. D’où la nécessité du confinement. Par ailleurs, si nous raisonnions à l’échelle des personnes à risque, le taux de mortalité serait bien supérieur (proche de 7%). Ce sont elles qu’il faut surtout protéger et c’est donc un geste solidaire que de respecter le confinement et les gestes de protection ».

Concernant le diabète, quels conseils donner aux diabétiques ?

« Le diabète concerne environ 3 millions de personnes en France. Ce n’est pas rien ! Je rappelle qu’il est défini par une hyperglycémie chronique supérieure à 1,26g/l et qu’il peut être soit de type 1 (surtout chez les enfants et traité par insuline – 150.000 cas en France) soit de type 2 (héréditaire mais souvent lié à l’obésité – au moins 2,5 millions de cas en France dont 400.000 ayant évolué vers le traitement à l’insuline). L’hyperglycémie chronique est bien connue pour favoriser les infections car elle baisse le nombre de lymphocytes tueurs (on les appelle des lymphocytes killers) et les rend moins efficaces. Un diabète mal équilibré expose donc aux complications graves de type Covid19. De plus, toute infection déséquilibre et aggrave un diabète existant. Le diabétique risque donc d’être pris dans un cercle vicieux. 

Je conseille donc à tous les diabétiques de particulièrement veiller à l’équilibre de leur diabète. Pour cela, il faut bien se surveiller régulièrement (par glycémies capillaires ou par lecteur de glycémies interstitielles) et adapter ses doses d’insuline en fonction des résultats glycémiques. La qualité de l’alimentation joue également un rôle majeur. Le grignotage de biscuits et gâteaux peut être particulièrement dangereux pour le diabétique. Il faut veiller à ne pas sauter de repas (risque d’hypo puis d’hyperglycémies), éviter tous les produits sucrés (remplacer les biscuits par des amandes, par exemple) et faire des repas à faible Index glycémique incluant systématiquement des légumes (les fibres ralentissent le passage du glucose dans le sang) et privilégiant les légumes secs pour changer un peu du riz ou des pâtes (toujours cuites al dente). Eviter les sodas et privilégier l’eau. Faire au moins 30 mn d’activité physique par jour, car les muscles pompent le glucose sanguin. Autre conseil : être à jour de ses vaccinations. Seulement 68% des diabétiques sont vaccinés contre la grippe, alors que tous devraient l’être !

Un menu en exemple, sur la journée : au petit déjeuner, 2 tartines de pain complet ou aux céréales ou tradition, légèrement beurrées (pas de miel, ni de confiture), un yaourt nature, un fruit ou un  jus de fruit (jus d’orange pressé ou en bouteille, pour la vitamine C), thé ou café (sans sucre) – au déjeuner, une part de viande ou de poisson avec mi légumes mi féculents (riz complet, pâtes al dente ou légumes secs), un peu de pain tradition, une part de fromage ou un laitage nature, un fruit –  au goûter, un fruit (éviter la banane) et des amandes – au dîner, un plat avec un part de poisson ou 2 œufs, avec surtout des légumes et un peu de féculents, un laitage nature et un fruit frais. Pas de sodas, boire de l’eau. Les édulcorants sont autorisés ».  

Concernant les personnes qui souffrent de surpoids. Que leur dire ?

« Les données médicales montrent que les personnes souffrant d’obésité sont des sujets à risque de complications. Je rappelle que l’obésité est définie par un Indice de Masse Corporelle (IMC) supérieur à 30. Le calcul se fait selon le rapport du Poids (en kilos) divisé par la Taille au carré (en mètre carré). Par exemple, un homme mesurant 1m 80 est considéré comme présentant une obésité au delà de 97 kilos – et une femme mesurant 1m 66, au delà de 83 kilos. Nous considérons divers degrés d’obésité, allant de l’obésité « simple » à l’obésité dite « morbide » avec un IMC > 40 (le même homme pèserait plus de 130 kilos et la femme plus de 110 kilos). Il est sûr que les complications liées à l’obésité sont des facteurs aggravants ; en effet ce sont des personnes qui présentent souvent également un diabète, une hypertension artérielle, des troubles respiratoires (apnée du sommeil, essoufflement permanent), un risque cardio vasculaire élevé … On ne sait pas encore si l’obésité en elle même, et indépendamment des complications qui lui sont liées, est un facteur de fragilisation mais on sait toutefois que les obèses ont souvent de moindres défenses immunitaires. Ce sont donc de toute évidence des personnes à risque de formes graves d’infection Covid 19, qui doivent absolument rester confinées et faire l’objet de toutes les précautions en matière de respect des mesures barrière (masques, gel hydro alcoolique, lavage des mains). Avis aux employeurs. 

Quant à la conduite à tenir à le maison, en confinement, je conseille d’abord de bien prendre ses traitements, pour bien contrôler les pathologies. Ensuite, il faut veiller à ne pas prendre davantage de poids. Même 2 ou 3 kilos de plus peuvent faire la différence en terme de déséquilibre des pathologies existantes ou à venir. Il ne faut donc pas banaliser la prise de poids. Dans ces conditions, veiller à faire des repas sains, variés et équilibrés. Surtout ne pas se lancer, dans la panique, dans des cures de jeun ou des régimes restrictifs sévères qui ne font qu’aggraver le déficit immunitaire et la fragilisation générale. Augmenter la consommation de légumes (à chaque repas) ; partager son assiette entre les légumes et les féculents ; ceux ci sont utiles pour bien rassasier et limiter le risque de grignotage. Manger de la viande, du poisson et/ou des œufs. Remplacer les desserts sucrés et les biscuits du goûter par un fruit et des amandes. Les petits efforts réguliers font les grands succès …

Quelques exemples : au petit déjeuner, 2 tartines de pain complet ou aux céréales ou tradition, légèrement beurrées (pas de miel, ni de confiture), un yaourt nature ou un bol de fromage blanc à 0% de MG avec des fruits rouges (frais ou surgelés), thé ou café (sans sucre) – au déjeuner, une part de viande ou de poisson avec mi légumes mi féculents, un peu de pain tradition, une part de fromage ou un laitage nature, un fruit frais –  au goûter, un fruit (éviter la banane), un laitage nature et des amandes – au dîner, un plat avec un part de poisson ou 2 œufs, avec surtout des légumes et un peu de féculents et terminer par un fruit frais. Boire de l’eau avant, pendant et après les repas. Les édulcorants sont autorisés. Et bien évidemment, augmenter son niveau d’activité physique en fonction de ses capacités. Il n’est rien de pire que la sédentarité. Marcher dans son appartement et suivre des tutoriels sur la gymnastique douce est recommandé.  Ces conseils sont également valables pour les personnes qui ont un surpoids modéré. Veiller d’ailleurs à se peser régulièrement pour ne pas avoir de mauvaises surprises lors de la levée du confinement ».

Et concernant les personnes à risque cardio vasculaire ?

« Très important : ne pas changer ses traitements habituels, que ce soit concernant les anti hypertenseurs et/ou l’aspirine à faible dose et/ou les anticoagulants et/ou les statines. Par ailleurs, concernant l’alimentation, limiter sa consommation de graisses saturées en évitant les produits de grignotage gras (les chips devant la télé), la charcuterie (le saucisson du soir), les fritures (les frites un jour sur deux), le beurre (la couche d’un centimètre sur le pain du matin), le fromage (le demi camembert du soir). Privilégier les graisses de l’huile d’olive (une cuillère à soupe par jour) et des amandes (une belle poignée d’une vingtaine d’amandes par jour, surtout l’après midi, pour calmer le petit creux). Manger des Oméga 3 grâce aux poissons gras (sardines, maquereau, saumon, hareng) au moins 2 fois par semaine, en frais, surgelé ou en conserve. Utiliser, pour les assaisonnements, l’huile de colza ou de noix et les margarines aux Oméga 3 voire aux phytostérols (en cas d’excès de mauvais cholestérol, uniquement). La crème, d’accord, mais allégée à 15 voire 8% de MG. Quant au sel, doucement, doucement. Redécouvrir le goût subtil des épices, ail, oignon, herbes aromatiques pour donner du goût à ce que l’on mange. Je précise, par ailleurs, que le vin rouge n’est pas un protecteur miracle du cœur et des vaisseaux ».

Concernant les personnes âgées. Quels conseils leur donner ?

« Avec l’âge, les défenses immunitaires baissent et les pathologies s’accumulent. Les personnes âgées (plus de 75 ans) sont donc fragiles et de potentielles victimes des attaques du virus. Elles ont toutefois des contextes de santé très variables d’une personne à l’autre. Les unes seront en bonne santé et autonomes – les autres seront déjà un peu fragiles et à la limite de la dépendance de leur entourage – enfin, une troisième catégorie de personnes âgées concerne celles qui sont devenues dépendantes de leur entourage et donc souvent placées en Institution, avec de multiples comorbidités. Ce sont ces dernières qui sont le plus concernées par le risque de complications sévères et donc de décès. D’ailleurs les Ehpad paient actuellement un lourd tribu à la mortalité globale. 

Mais revenons à celles qui sont confinées chez elles et qui doivent strictement le rester. Je donne 3 types de conseil : garder le lien social avec les amis et la famille, par téléphone ou ordinateur – conserver un minimum d’activité physique à la maison (marcher, bouger, faire des exercices de gymnastique douce) – manger bien et régulièrement pour ne pas maigrir et risquer de se dénutrir. Il est important de conserver le petit déjeuner, le déjeuner, le goûter et le dîner. Manger suffisamment de protéines dans la journée, grâce aux produits laitiers, aux œufs, à la viande et au poisson – et avoir suffisamment de vitamines et d’antioxydants grâce aux fruits et aux légumes, à chaque repas. Manger gourmand mais utile ! Les biscuits, c’est certes très bon mais ça ne vous apporte pas de vitamine C. Boire 6 à 8 verres d’eau par jour, en dehors des petites tisanes et soupe du soir – et garder le moral !

Quelques exemples : le matin au petit déjeuner, un peu de pain beurré confituré ou 2 ou 3 biscottes, une boisson chaude (souvent de la Ricoré°, d’ailleurs). En matinée, un verre de jus d’orange et un yaourt. Au déjeuner, un plat principal avec viande ou poisson, des légumes et un peu de féculents, et un fruit. L’après midi, une crème caramel ou du fromage blanc avec une délicieuse compote – et un petit fruit (genre clémentine ou kiwi). Le soir au dîner, un potage de légumes avec du jambon ou un plat principal idéalement avec des œufs, un laitage et un fruit. Et évidemment, les 2 carrés de chocolat noir et le petit biscuit ! ».

A quand le traitement et le vaccin ?

« Je peux vous dire que nos chercheurs, médecins et scientifiques, avancent à grands pas et font un travail remarquable. Ils ont déjà compris une grande partie du mode d’action du virus et cherchent la parade. Il y a déjà des hypothèses et des essais cliniques en cours avec des molécules d’approches différentes. Faisons leur confiance. Nous y arriverons. Pour le moment, le meilleur traitement est le confinement pour éviter toute contamination. Quant au vaccin, je pense que cette épidémie catastrophe est la preuve éclatante de la nécessité de la vaccination. Ce n’est pas le premier virus qui nous agresse et ce ne sera pas le dernier. Si nous avons la chance de nous prémunir des plus dangereux par la vaccination, il faut la saisir. C’est déjà le cas du vaccin contre la grippe et contre le pneumocoque – comme pour tous les autres vaccins. Le meilleur moyen d’éviter la maladie, c’est d’avoir en nous l’armada d’anticorps prêts à l’attaque pour nous défendre. Et cela, seul le vaccin le permet ! ».